La rivalité entre monnaies digitales souveraines et monnaies cryptées privées

La rivalité entre monnaies digitales souveraines et monnaies cryptées privées

L’aventure du bitcoin parle des prouesses d’une initiative disruptive pour faire jaillir un instrument radicalement nouveau. Pourquoi cette aventure ?

 

 

Il faut commencer par des considérations qui n’ont rien à voir avec la technologie ou l’informatique

Au-dessus du berceau du bitcoin se penchaient trois fées qui se nommaient : Anonymat, Minage, Cryptage. La crise de 2008 était passée par là. Les banques étaient discréditées ainsi que leurs dirigeants. Les idées américaines libertariennes qui avaient essaimé dans la Silicon Valley se sont alors concrétisées en propositions monétaires.

On ne racontera pas plus avant la saga du bitcoin, sa blockchain, ses mineurs, les 21 millions de bitcoin et sa fulgurante progression sur les marchés.

Créer une monnaie digitale, ce serait donc satisfaire l’avidité des spéculateurs, des financiers et des traders à la petite semaine ?

Les monnaies digitales : champ libre pour l’initiative privée monnaies digitales ?

Certaines ont été créées pour rire, le dodge coin par exemple ! A l’étonnement de ses initiateurs, cela a marché ! Démontrant par l’absurde que créer une monnaie cryptée n’est pas si difficile que cela !

Pour d’autres, l’objectif était de créer un système de financement assorti de leur participation à un écosystème de dimension réduite. Ce sont les monnaies digitales nées à l’occasion des ICO (Initial Coins Offerings). Leur nombre explique le nombre des monnaies cryptées. Sur des marchés de petite ampleur, elles ne permettent que des transactions limitées.

Sont aussi très tentées par les monnaies cryptées, les grandes plateformes de paiement en ligne, les grands vendeurs en ligne et aussi les Facebook, Google et autres Microsoft. Il s’agit de tirer parti de leurs gigantesques bases de clientèle et, saisissant données et informations financières, de lancer des offres de services financiers, bancaires ou d’assurance.

Ces propositions de monnaie privée viennent se superposer à celles de plateformes de paiement. La dernière et la plus frappante fut la libra de Facebook.

Initiatives publiques dans le monde des monnaies digitales ?

C’est dans un contexte florissant d’initiatives privées en tous genres, qu’apparaissent les propositions de monnaie digitale souveraine (ou banque centrale). Entre Chine et Iles Bahamas, ce sont le crypto-yuan ou renminbi digitale, et le Sand-dollar. En Europe, l’e-krona suédois est bien engagé.

Plusieurs motifs poussent les Etats à réfléchir à la mise en place de monnaies digitales souveraines.

Tout d’abord, la pression des innovations sous la forme de paiements en ligne. La révolution des paiements conduit à la régression de la demande de paiements fiduciaires : les billets de banque sont en perte de vitesse et confinés par l’essor des paiements en ligne. Les Etats réagissent au risque de détournement des flux de paiement nationaux vers des plates-formes privées supranationales.

Mais aussi, et surtout, le motif principal est le rôle de l’Etat dans la sécurité et la régularité des paiements, dans la protection de ses utilisateurs et dans la confiance qui doit régner quant à la compensation des dettes et des créances.

Le lancement de monnaies digitales souveraines s’appuie sur un double avantage

– La capacité des Etats à décréter le cours légal d’une monnaie : on ne peut pas la refuser en paiement.

– Le fait que le détenteur d’une monnaie souveraine est créancier du souverain, ce qui, en principe, vaut mieux que d’être créancier d’une plateforme difficile à localiser, installée dans de lointains havres fiscaux.

La messe est-elle dite ? Le lancement à courte échéance du Yuan digital, les propositions suédoises d’une monnaie digitale souveraine et les études lancées pour un e-euro montrent que la bataille des monnaies digitales ne fait que commencer.

 

Par Pascal Ordonneau

Photo de M. Pascal Ordonneau

Ouvrages de Pascal Ordonneau aux éditions Arnaud Franel :
Monnaies cryptées et blockchain
Des monnaies cryptées aux ICO

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Pascal Ordonneau
Pascal Ordonneau, banquier, a été DG et PDG de banques françaises, anglaises et américaines. Il est SG de l’Association « Iconomy ». Auteur d’une dizaine d’ouvrages parmi lesquels cinq livres d’économie et de finance, il est chroniqueur aux Échos, au Huffington Post et conférencier (monnaies cryptées et Allemagne).

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