Divorce : l’accord amiable au cœur de la procédure (1/3)

Divorce : l’accord amiable au cœur de la procédure (1/3)

Avec près de 130.000 divorces par an, la rupture du lien conjugal constitue un véritable phénomène de société : 45 % des mariages finissent désormais par un divorce.
D’institution pérenne et stable, le mariage tend à devenir de plus en plus un contrat à durée déterminée, résiliable à tout moment.

Ce phénomène de « contractualisation » du mariage, inspiré de la culture anglo-saxonne, est aujourd’hui accentué par les réformes successives du mariage et par le succès grandissant du Pacs[1] (dont la caractéristique est la simplicité de la rupture, traduisant une absence d’engagement durable).

La dernière réforme du divorce, dont la justification principale est de « désengorger » la justice, prolonge la tendance à la « désacralisation » du mariage dont l’organisation et la rupture est désormais une affaire privée dans laquelle la justice n’est présente que s’il s’agit de trancher un litige[2].

En effet, alors que le recours au juge était jusqu’à présent obligatoire, la plupart des divorces par consentement mutuel se font désormais sans l’intervention du juge[3]. Ce sont près de 55 % des divorces qui sont concernés par cette nouvelle procédure. En parallèle le magistrat a été remplacé par deux avocats et par un notaire, chargé d’« enregistrer » la convention, mais dont le rôle est bien différent de celui du juge.

Cet article propose de faire un point sur la nouvelle procédure (I) tout en rappelant que la recherche d’accords amiables est également encouragée dans les divorces contentieux (II).

I-La nouvelle procédure de divorce inaugure le divorce sans juge

Avec le divorce sans juge, le divorce devient une affaire privée que les parties doivent résoudre par elles-mêmes.

Un désengagement du juge et un renforcement du rôle des avocats

Depuis le 1er janvier 2017, les époux qui sont d’accord à la fois sur le principe de la séparation mais aussi sur ses conséquences n’ont plus besoin de saisir le juge.

Dans l’ancienne procédure de consentement mutuel, l’intervention du juge se justifiait non seulement pour « solenniser » le divorce (contrepartie du caractère « institutionnel » du mariage) mais aussi parce qu’il jouait un rôle actif : c’est lui qui prononçait le divorce et homologuait la convention. Le juge s’assurait non seulement de la volonté des époux de divorcer mais aussi de l’équilibre de la convention et de la bonne compréhension par chacun de ses engagements. Il recevait d’abord séparément les époux (afin de s’assurer notamment de leur indépendance dans la prise de décision et de leur bonne compréhension de leurs accords) puis ensemble pour confirmer leur volonté de divorcer.

Dans la nouvelle procédure, l’intervention du juge est remplacée par l’obligation des parties d’avoir chacun leur avocat et de déposer la convention au rang des minutes d’un notaire.

 Le recours obligatoire à deux avocats est destiné à s’assurer qu’aucun des époux ne subit les pressions de son conjoint pour accepter un accord déséquilibré.

L’office du juge est ainsi remplacé par le devoir de conseil de chaque avocat vis à vis de son client. Ceci explique que les avocats doivent être indépendants (ils ne peuvent appartenir à la même structure d’exercice).

Par ailleurs il est mis en place un délai de réflexion de 15 jours avant toute signature, afin de s’assurer que les époux ont bien pu réfléchir au contenu de la convention qui leur est envoyée par lettre recommandée avec accusé de réception.

[1]  Environ 190.000 pacs par an contre 233.000 mariages (statistiques 2016).
[2] Ce qui est déjà le cas pour les changements de régime matrimonial en présence d’enfants majeurs ou de créanciers ne s’opposant pas audit changement.
[3] Le juge n’intervient que si l’enfant mineur demande à être entendu. Or, la probabilité qu’un enfant mineur demande à être entendu est assez faible, d’autant plus que si l’enfant mineur demande à être entendu la procédure de divorce sans juge ne peut plus s’appliquer et c’est alors l’ancienne procédure judiciaire qui s’applique. On mesure donc ainsi la pression morale que doit subir l’enfant qui souhaiterait être entendu par le juge puisque cela reviendrait à aller contre la volonté de ses deux parents…

 

Découvrez dans le prochain billet le rôle du notaire dans cette procédure: a lire ici

Par Paul-André Soreau

Photo de M. Paul-André Soreau

Ouvrages de Paul-André Soreau aux éditions Arnaud Franel :
ID Reflex’ Successions – 8e édition
ID Reflex’ Transmission d’entreprise – 2013
ID Reflex’ SCI – 2014

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