Le goodwill n’est pas une immobilisation incorporelle
IAS 38 définit un actif incorporel comme : « un actif non-monétaire identifiable sans substance physique ». Les actifs monétaires sont exclus parce qu’ils seront réglés par la réception d’un montant fixe (ou déterminable) d’unités monétaires. Ce sont donc des actifs financiers. Bien qu’ils n’aient pas de substance physique, ce ne sont pas des actifs incorporels.
Donc, ce qui définit un actif incorporel est le fait d’être identifiable. Selon IAS 38, cela résulte d’au moins un des deux critères suivants :
- Résulter de droits légaux ou contractuels
Cela signifie que le détenteur peut faire valoir ses droits devant les tribunaux. Ainsi, un club de foot qui a versé quelques millions d’euros pour s’attacher l’exclusivité d’un joueur, dispose bien d’un actif incorporel : si le joueur prétend jouer ailleurs, le club pourra l’attaquer devant les tribunaux et gagner. Ici, l’actif résulte de droits contractuels. De nombreux contrats donnent ainsi naissance à des actifs incorporels : concessions de service public, contrats d’exclusivité, ou tout simplement carnet de commandes.
Les droits peuvent également résulter de la loi. Ainsi, une entreprise qui conçoit un logiciel, le design d’un objet ou toute œuvre de l’esprit dispose d’actifs incorporels : si un tiers les copie sans autorisation, elle peut l’attaquer devant les tribunaux et gagner. De nombreux actifs incorporels résultent de droit à la propriété technologique (brevet), commerciale (marque) ou artistique (design).
- Être séparable de l’entité
Cela signifie pouvoir être vendu, concédé, loué. Ainsi, une liste clients ne résulte pas de droits que l’entreprise peut faire valoir devant les tribunaux : elle ne peut pas attaquer un concurrent qui lui « vole » ses clients. Néanmoins, la liste peut être copiée et vendue à un tiers.
De même certains procédés de fabrication ou « recettes » sont séparables, si on peut les écrire puis les vendre ou les donner en franchise.
Le goodwill ne répond à aucun de ces deux critères
Lors d’une acquisition, l’acquéreur peut considérer qu’une partie du prix payé l’est en rémunération du potentiel de croissance de l’entreprise achetée, de sa part de marché ou de la qualité de son personnel. Aucun de ces éléments n’est protégé sur le plan contractuel ou juridique : on ne peut pas attaquer un concurrent qui « vole » notre part de marché, on ne peut pas faire valoir son potentiel de croissance et les membres du personnel sont libres de partir. De plus, aucun de ces éléments n’est séparable. Quand on les paie lors d’une acquisition, ils font partie du goodwill.
En conclusion, le goodwill est bien un actif sans substance physique, mais il n’est pas une immobilisation incorporelle au sens des IFRS.
Christophe Marion
Christophe Marion est l’auteur du Livre “Les 10 sujets-clés de l’analyse financière” :
